Les usagers acteurs d’un processus de collecte sélective

La dépendance réduit généralement la sphère d’influence des individus. Un homme aura été chercheur, instituteur, maire… Lorsque l’âge ne permet plus à ses  jambes  de  le  porter,  à  son  esprit  de  le conduire, à ses yeux de le guider, le sentiment    d’ « inutilité » sociale s’insinue sournoisement.

Ce constat est quotidien en maison de retraite. Tant d’énergie déployée par le personnel pour inciter Madame X, pianiste à la retraite, à jouer un air pour les anniversaires, Monsieur Y, lauréat répété des concours de maisons fleuries, à planter les fruitiers pour de futurs moments culinaires. Pourtant, si ces personnes devenues âgées ne se pensent plus capables de jouer un rôle social, là est le défi de la structure: faire valoir leurs compétences jusqu’au bout, et maintenir ainsi leur dignité.

Les résidents, âgés de 90 ans en moyenne, ne l’ont pour la plupart jamais fait. Il faudra donc communiquer, expliquer, et mettre en place une organisation permettant à chacun de s’investir. Pour ceux qui le peuvent, des bennes seront identifiées sur le parking de la résidence. Pour les autres, l’animatrice passera chaque semaine dans les chambres relever les déchets. Elle organisera une journée mensuelle où tous seront conviés à vérifier, empaqueter, lacer (conditions fixées par l’entreprise partenaire).S’il est un domaine où chacun peut jouer un rôle, c’est celui de la préservation de l’environnement. Le projet de tri des papiers/journaux/ magazines/cartons et de leur revente se fixe pour objectif premier d’intégrer le plus grand nombre de résidents dans l’acte de jeter ses déchets dans des contenants appropriés.

Les proches des résidents sont également conviés à apporter piles de journaux, publicités à peine parcourues, cartons déchirés. Ils ne seront  alors  plus  simplement « clients» d’une structure, mais partenaires de son action.

Le personnel se garera chaque jour près des bennes. Espérons qu’il soit tenté ! Au-delà de l’intérêt évident de recevoir les déchets de cinquante personnes supplémentaires, cet investissement serait signe d’un engagement de ceux qui travaillent dans la résidence pour la réussite de ses projets.

Les voisins, enfin, seront informés par un prospectus dans leur boîte aux lettres. Après l’avoir lu, ils pourront venir le jeter avec le reste des déchets concernés dans les bennes du parking de la résidence. Ce sera, pour l’immense majorité d’entre eux, la première fois qu’ils en franchiront le portail. L’établissement est situé en zone résidentielle d’une grande ville, où chacun se croise, mais vit derrière ses haies.

Lorsque la place viendra à manquer pour stocker ces paquets ficelés, l’entreprise res- ponsable de leur valorisation viendra les retirer. La pesée permettra de connaître le gain. Là apparaît le second objectif du projet : financer une animation nouvelle pour les résidents.

Pourquoi ne pas inviter les voisins, désormais un peu plus proches, à partager un verre avec nos résidents chaque mois ? Cette action prendrait alors une autre dimension : celle d’ouvrir la résidence à tout un chacun, et, à long terme, de permettre à tous de mieux appréhender la vieillesse pour mieux l’accepter. Alors peut-être que l’angoisse de l’ « inutilité » sera apaisée lorsque viendra leur tour.